C'est dans ce contexte peu propice aux fous rires que se place la dernière production de Koei en France, le bien nommé Romance Of The Three Kingdoms VIII. Connu plutôt pour sa série Dynasty Warriors, cette société japonaise s'est spécialisée dans les softs à consonance historique. Disposant dans leur majeure partie d'un background très précis et documenté, ils font figure de référence dans ce domaine. Pourtant, loin des charges guerrières d'un Dynasty, Romance s'apparente plus facilement à un titre misant son fondement sur la stratégie précise et intelligente. Commencée sur Nes il y a maintenant environ 15 ans, la quête épique des héros chinois en est à son neuvième épisode au Japon. C'est donc un quasi miracle de pouvoir, nous, petits français au regard triste, plonger au coeur d'une trame riche, exhaustive et vectrice d'une culture peu connue et sincèrement passionnante. D'autant que les développeurs ont mis l'accent sur la vie plutôt que sur la mort tragique sur le champ de bataille. Explication.

Tout d'abord, votre premier acte en tant que soldat sera justement d'un être un, tout simplement. En effet, vous devrez vous créer un avatar ou bien, mais l'intérêt s'avère moindre, utiliser un personnage ayant oeuvré et laissé son nom dans l'histoire. Dans le premier cas, le nombre de possibilités augure déjà sur la complexité générale du titre. Votre visage, votre nom, votre date de naissance, le nom de vos parents, de vos amis, votre point fort, vos aptitudes, tous ces aspects sont à prendre en compte lors du façonnage de votre poulain. Une fois cela effectué, il vous faut vous préparer mentalement à jouer un rôle plus que prépondérant dans le tournant le plus important de l'Etat chinois, tant au niveau politique que culturel. Choisissez-vous maintenant des alliés, une province à diriger et un contexte historique prenant en compte votre venue au monde. Vous n'aurez effectivement la possibilité de vous servir de votre personnage modelé de toutes pièces que s'il est au moins âgé de 15 ans au moment des faits. Et c'est à ce moment précis que vous pénétrerez dans les abîmes de la gestion d'une société confrontée à la folie des hommes. N'oubliez jamais qu'un conflit n'est jamais l'oeuvre d'une seule personne, et que beaucoup d'autres intervenants peuvent influer le cours des évènements, a fortiori vos propres troupes et relations. Il apparaît donc comme nécessaire d'utiliser en priorité la puissance de l'esprit, et de laisser de côté la force physique.

Cet état de fait est d'ailleurs souligné par la présence de Conseils précédant chaque pugilat. Lors de ces discussions cruciales pour le déroulement des évènements, vous aurez la délicate mission d'organiser les fonctions vitales de votre localité, et ceci par le biais de moyens divers et variés. Sans vous énumérer toutes les possibilités présentes (il faudrait au moins un dossier), il vous est possible et conseillé d'envoyer un espion dans une ville adverse, d'organiser vos défenses, de provoquer une révolte de manière à déstabiliser votre opposant, d'abattre les fortifications d'une cité rebelle, de retourner un commandant contre son propre camp, et ainsi de suite dans une jouissance machiavélique qui n'a pas d'égal. Une campagne bien préparée est la clé d'un futur succès. Vous foulez désormais les vertes plaines centrales détrempées par la pluie furieuse couvrant le choc des fers. Le champ de bataille s'apparente à une carte en 2D de très faible qualité graphique, où l'on peut voir quelques détails mineurs tels des reliefs montagneux et des régions boisées. Vous prenez alors le contrôle d'une ou plusieurs troupes lancées à l'assaut d'une ville ou d'une place forte. Les déplacements quant à eux restent dans la droite lignée des T-RPG classiques à la Arc The Lad par exemple, en proposant une zone colorée délimitant la zone de mouvement, sur laquelle il est de bon ton de placer ses divisions lourdement armées. Vous apercevrez également une ligne composée de pointillés bleus. Elle symbolise la limite de la voie de ravitaillement. Ce qui signifie que si vous vous éloignez trop de cette mâne, le moral de vos soldats diminuera de plus en plus, jusqu'à provoquer une désertion. Le plus malin est alors d'attaquer un poste avancé ennemi afin d'empêcher que celui-ci ne coupe l'apport de vivres. De même, dépasser trop effrontément la zone correspondant à vos mouvements, vous conduira à une marche forcée, et par la même à une désaffection de vos fiers bellicistes. Il n'est part conséquent pas besoin de signaler l'importance non feinte de gérer votre marche vers la victoire de manière réfléchie. L'utilisation de stratagèmes et de déploiements décidés lors du Conseil est également accessible via un menu, sobre et clair, permettant de se retrouver relativement facilement dans l'amas d'informations mises à votre dispostion. Il est de plus vraiment intéressant, en plein milieu de la prise en tenaille de la cavalerie Wu, que celle-ci reçoive le soutien d'archers demeurés jusque là inconnus de vos informateurs et donc de vos attentes. Des retournements de situations judicieusement placés, dans une optique semblable à celle des duels.

Plusieurs fois durant l'âpre enchevêtrement de corps et de lames, les généraux ou commandants antagonistes se lancent des vilenies ayant pour seule finalité un tête à tête meurtrier, situé dans un environnement particulier, où le niveau artistique est un tout petit rehaussé du fait d'une grosseur plus conséquente des sprites. Tout est alors basé sur un combat au tour par tour, durant lequel il est impératif de préparer son attaque et sa riposte avant de commencer tout accrochage dans les règles de l'art. Au final, le soldat déchu est capturé par le vainqueur, provoquant au coeur de son armée une panique sans précédent. Notez qu'il vous est possible de déclencher une telle action dès qu'une unité adverse se trouve à votre portée. Une arme à double tranchant en somme. Un ensemble apportant une façon d'appréhender une altercation originale et fortement addictive, qui aurait aisément pu trouver acquéreur en de nombreux joueurs si seulement Koei s'était un peu plus préoccupé de la forme. Mise à part la sublime introduction, on se demande constamment si nous n'avons pas à faire à un émulateur super nintendo voir nes. Un écueil regrettable qui n'aidera pas les plus réticents à ce genre de titre à s'immerger complètement dans une ambiance pareille à aucune autre. Mais la guerre n'est pas tout dans l'existence.

Peu après un Conseil, si tant est que vous n'ayez pas choisi l'option pugilistique, il vous appartiendra de contrôler le bon fonctionnement de votre bourgade. Pour se faire, il vous suffit de confier les tâches relatives à la recherche, à la culture, à la protection, etc... à certains de vos hommes de confiance. Néanmoins attention à prendre les bonnes décisions, car chaque choix vous enlève des points de CP ou d'AP (commandes stratégie et personnelle seulement). De même, après cet interlude prouvant votre statut de chef, vous rentrerez en ville et pourrez effectuer également des modifications de la politique urbaine, ainsi que discuter avec vos militaires. Cette dernière option se revèle très importante, vous permettant notamment de gagner du charisme, et d'avoir parfois l'occasion de rencontrer des grands guerriers à enrôler. Un subtile mélange au goût parfumé, empreint des douces saveurs et senteurs de la Chine. Un peu trop obtus et dramatique graphiquement, ce titre s'impose tout de même comme une très bonne alternative à Dynasty Tactics. Enfin, les compositions musicales traditionnelles sont pour beaucoup dans l'attrait envoûtant du soft. Une qualité sonore exemplaire et un charme enivrant. Des instants de rêverie à l'état pur. Affûtez vos lances !