S'appuyant sur la maxime « Mieux vaut tard que jamais », accueillons comme il se doit le premier opus de la quadrilogie Dot Hack, sous titré Infection, sur le vieux continent. Sorti il y a deux ans environ au Japon (le pays des RPGistes heureux !), ce projet à haute teneur en multimédia s'offre à nous grâce aux bienfaits d'Atari qui propose de surcroît une version française bienfaitrice. Inutile de dire que l'année 2004 s'annonce chargée en RPG de toutes sortes et si vous avez décidé de souffler entre un Sword Of Mana et un FFTA, faites très attention à .hack Infection qui pourrait bien vous faire suffoquer.
Le principe de ce titre, s'il se veut intriguant, bien pensé et ambitieux, n'est pas unique en soi. Ainsi, proposer au joueur de vivre une aventure au travers de plusieurs médias est un procédé qui a déjà vu le jour au Japon il y a quelques temps. Citons par exemple l'excellent « Blood The Last Vampire » qui, au travers d'un film renversant (si vous n'avez pas encore vu le chef-d'œuvre de Hiroyuki, jetez-vous dessus), d'un manga, d'un roman (écrit par Oshii Mamoru lui-même) et d'un jeu vidéo, nous contait les aventures de la mystérieuse Saya. Par contre, ce genre de curiosité n'a que rarement atteint nos frontières et c'est avec une appétence tendant vers une faim pantagruélique que nous allons enfin pouvoir goûter à cet univers où série TV, OAV, manga et jeu vidéo se mêlent, se démêlent pour au final fusionner donnant au lecteur/joueur/téléspectateur une vision d'ensemble d'un projet qu'il ne fera que survoler au travers du premier opus de la saga auquel ce test fait référence.
Si le joueur pourra au premier abord être décontenancé par ce Tout semblant indivisible, commençons tout d'abord par rassurer le petit barde de niveau 1 qui sommeille en vous. Certes Dot Hack s'étend sur plusieurs supports mais il ne sera nullement obligatoire de tout voir pour comprendre le pourquoi du comment. La bonne nouvelle est que vous trouverez la première OAV en bonus avec le jeu Infection et ceci se réitérera bien entendu pour les trois volumes à venir. Ne voulant pas vous gâcher la surprise de la découverte, disons simplement que ladite OAV (de 45 minutes agrémentée de quelques bonus sympathiques vous aidant à mieux appréhender le jeu et les animes) reste dans un style contemplatif, posé et présente divers personnages tout en induisant les notions de base qui régissent l'univers de Dot Hack et par extension celui de The World, le monde virtuel (dans le monde virtuel) dans lequel vous allez évoluer. Une OAV qui ne brille donc pas par sa réalisation mais par son scénario, son atmosphère qui, à défaut de fasciner, donne envie d'en voir plus, ce constat s'avérant exactement le même pour le jeu. La série TV (qui devrait bientôt arriver sur Game One et qui raconte des événements antérieurs à ceux du jeu) se passera également dans le MMORPG The World mais s'attardera sur le sort de protagonistes que vous pourrez rencontrer ultérieurement dans le jeu. Quant au manga, disons que celui-ci sera directement rattaché à la série animée mais une fois encore je préfère vous laisser en compagnie des bonus qui vous expliqueront le tout en détails.
En parlant de détails, penchons-nous un peu sur le concept de Dot Hack. Le tout est en fait très simple, du moins à la base. Vous y incarnez un garçon qui va découvrir un MMORPG du nom de The World. Vous débutez ainsi l'aventure devant un écran représentant le bureau (que vous pourrez modifier) de votre ordinateur. Vous pourrez ici consulter diverses news (sur le monde «réel» ou sur tout autre chose), lire vos mails, sauvegarder votre partie et bien entendu accéder à The World, le fameux MMORPG. Une fois que vous aurez décidé de jouer à The World, vous aurez accès à deux autres fonctions, une vous permettant d'entrer véritablement dans le jeu (en se connectant) l'autre vous amenant au forum du MMORPG où vous trouverez une mine de renseignements sur le jeu. J'espère que jusque là tout le monde suit car ceci se complique un peu par la suite. Une fois rentré dans le jeu, vous allez évoluer comme dans n'importe quel RPG en combattant des créatures pour gagner de l'EXP, en achetant des objets, des armes, des armures et ferez la rencontre de plusieurs NPC ou alliés. Mais ce qui représente la grande force de Dot Hack est le fait que les personnes que vous verrez sont également des joueurs connectés avec lesquels vous pourrez parler ou troquer des objets. Ainsi, par rapport à un vrai RPG, le rapport avec eux est différent tout en étant similaire car à certains moments on aura vraiment l'impression de se retrouver devant un véritable MMORPG. Ceci se caractérise par des mouvements rapides des NPC qui évoluent comme bon leur semble (c'est un peu difficile à décrire mais le côté « je cours sans savoir où je vais » propre à pas mal de MMORPG est ici très bien représenté) et des dialogues visibles (par le biais de fenêtre de chat au dessus de leurs avatars) entre les personnages qui se veulent banals et peu originaux comme des «Génial ton armure !», «Suis-moi, je sais où trouver des monstres d'un haut niveau.», etc. De plus, si vous trouvez des personnages qui veulent bien se joindre au groupe (ceci étant par contre scénarisé comme dans tout RPG), il sera fréquent que vos compagnons vous quittent sans crier gare pour aller dormir ou manger, dans le vrai monde.
Le tout est donc diablement réussi et il est dès lors fascinant de rentrer dans le jeu qui constitue Dot Hack sachant qu'au travers de The World, nous allons vivre une histoire liée où le monde réel se fait plus ou moins avalé par le MMORPG en question. Je ne vous en dirais pas plus si ce n'est que tout commencera par des joueurs de The World étant subitement tombés dans le coma, à l'instar de Orca, un joueur de haut niveau qui vous prendra sous son aile au début du jeu. Pour ceux que cela intéresse l'atmosphère se rapproche énormément de la série Serial Experiments Lain sachant que le jeu The World fait bien sûr penser au Wired de Lain. Ce qui m'a véritablement conquis est également le fait que vous allez constamment devoir naviguer entre The World et le monde réel pour aller consulter vos mails, pour écrire aux personnes rencontrées dans le jeu, poster des messages sur le forum du jeu, ceci se faisant toujours automatiquement car mus par le scénario. Vous devrez aussi éplucher le forum du jeu pour trouver des indications indispensables à la poursuite de l'aventure une fois revenu dans le MMORPG. Pour vous situer, on retrouvait d'une façon plus ou moins similaire, ce va et vient dans le RPG tactique Front Mission 3 dans lequel le Network se voulait riche de renseignements de toutes sortes. Pour terminer cette petite partie explicative, on peut donc dire que Dot Hack est un RPG classique à la surface (sur lesquels glissent montée de niveaux, nombreux combats et visites de donjons) mais extrêmement travaillé dans le fond qui ne posera qu'à la toute fin toutes ses cartes sur la table. Ayez donc à l'esprit que Dot Hack // Infection n'est que le premier segment d'une série de quatre jeux, eux-mêmes, pièces d'un gigantesque puzzle multimédia élaboré...au potentiel commercial mûrement réfléchi.
Si on rentre ensuite dans le cœur de The World, le Rpgiste devrait y être très à l'aise puisque peu de nouveautés y sont visibles, les quelques pièces rares éparses étant directement liées au concept même de la série Dot Hack. Vous évoluerez donc sur plusieurs serveurs d'où vous pourrez atteindre diverses zones via un portail (la porte du Chaos) qui fonctionne suivant une combinaison de mots-clés. Cette combinaison représentera le niveau de difficulté de chaque zone (ou champ) et un écran d'informations vous informera également de l'élément dominent (eau, terre, etc.), et de divers détails sur la zone concernée. Au fil de l'aventure vous aurez accès à d'autres serveurs et zones rattachées et ce qui restera identique sera alors le cheminement. Au travers de l'avancée du scénario, vous arriverez dans une ville racine, où vous pourrez converser avec d'autres joueurs, faire vos emplettes, sauvegarder et atteindre les fameux champs via le portail. A ce sujet, vous pourrez obtenir de nouveaux mots-clés via le forum du jeu (comme je le précisais plus haut), par l'intermédiaire de vos compagnons, ou en faisant tourner la roue du hasard. Par contre je vous dirais qu'il vaut mieux éviter cette dernière solution sachant que vous aurez de grandes chances de tomber sur une zone avec des monstres d'un haut niveau qui pourront vous tuer en un coup. Le plus simple sera encore de passer par des zones Débutants pour se faire un peu d'expérience (vos niveaux montant assez rapidement) et ainsi courir moins de risques, surtout au début du jeu quand vous n'aurez pas d'amis sur qui compter. Enfin, vous trouverez plusieurs portes qui seront à pirater, pour être débloquées, grâce à des âmes virus obtenus en utilisant le don Pompe Données (voir plus bas). Ensuite, une fois dans une zone, vous pourrez en utilisant une fée voir apparaître sur une carte des points jaunes qui vous montreront l'emplacement d'ennemis ou de coffres (certains étant piégés), très utiles pour leveler ou obtenir plusieurs objets que vous pourrez revendre, troquer ou utiliser.
L'autre point très important se situe au niveau des donjons qu'on trouve dans chaque zone. Et oui, Dot Hack est un dungeon-RPG dans la plus pure veine de Dark Cloud. Il est clair que cet aspect ne plaira pas à tout le monde puisque le titre tient beaucoup plus de DC (avec ses longs couloirs monotones) que de Dark Chronicle en terme de technique. Une fois dans un donjon, vous ne pourrez pas sauvegarder, ces derniers étant malheureusement très longs (du moins ceux qui ne sont pas obligatoires) et si vous n'avez pas un stock conséquent de potions, d'antidotes ou de sorts, vous allez en baver. Dommage d'ailleurs que la difficulté soit assez mal dosée et qu'il faille activement leveler pour éviter de passer bêtement (en recevant une attaque critique d'un ennemi) de vie à trépas au dixième étage d'un donjon par exemple après y avoir passé une bonne demi-heure !! Ceci est aussi valable pour les tous premiers boss, la prudence sera ainsi de mise. Par contre pour vous éviter des excès de rage, je vous signale que vous pourrez toujours revenir dans une salle du donjon déjà visitée pour y retrouver des jarres qui réapparaîtront même si vous les avez détruites auparavant. Pratique pour avoir des objets bien utiles. N'oubliez pas non plus de former un groupe (en envoyant un message à vos amis) avant de partir à l'aventure, ceci étant indispensable pour profiter pleinement des combats qui sont beaucoup plus intéressants à plusieurs.
Le reste du système de jeu est assez classique. Vous pourrez former un groupe de trois personnages maximum (en choisissant parmi les joueurs rencontrés au grès du scénario), en ayant bien en tête que vous ne dirigerez de manière bien réelle que le personnage principal (tout en pouvant donner des ordres à vos coéquipiers qui orienteront le style de combat du groupe ou en choisissant une technique d'un compagnon que ce dernier utilisera par la suite) et gambaderez joyeusement en affrontant des monstres dans des combats en temps réel (Dot Hack étant assimilé à un Action-RPG). Vous devrez user de plusieurs objets (offensifs ou défensifs) pour vous défendre et aurez accès à plusieurs techniques rattachées à vos armes ou armures. Pour utiliser ces dons, vous devrez mettre à profit des points de PD qui se régénéreront constamment. Ceci est vital pour l'aventure puisque des techniques différentes seront associées à votre équipement. A vous, après ça, de bien choisir l'arme (et donc les techniques, d'attaque physique, magique, de protection..) qui convient suivant les ennemis peuplant une zone. La dernière chose à ne pas omettre sera le dernier don du nom de Pompe Données. Une fois que vous aurez affaibli un monstre, le mot Infiltration apparaîtra à l'écran. A ce moment-là, vous pourrez utiliser votre don pour redéfinir les données d'un monstre ce qui l'affaiblira (et le fera changer d'apparence par la même occasion) ou le tuera sur le coup. Attention par contre car l'abus de cette technique pourra être synonyme de fin de partie sachant qu'à chaque utilisation de ce don (grâce auquel vous obtiendrez des âmes virus, des objets), un virus se répandra dans le programme et une fois atteint les 100 % le Game Over apparaîtra sans autre forme de procès.
Comme vous avez pu le voir sur les quelques screenshots qui sont sur votre droite, la technique n'est pas vraiment au rendez-vous. Bien que le jeu date de quelques années, ceci n'est pas une excuse puisque Final Fantasy X était sorti à la même époque. Bref, si quelques personnages profitent d'un excellent design, d'autres en revanche font peine à voir. Ce constat vaut surtout pour les monstres du titre qui sont relativement moches et sans grande originalité. Les décors sont vides (bien que parfois surprenants), font vraiment pitié et ceci atteint son paroxysme une fois entré dans un donjon où tout n'est qu'immenses couloirs sans fin. Dot Hack ne s'appuie donc pas sur un graphisme exubérant bardé de détails mais plutôt sur des compositions musicales très réussies qui si elles restent inégales n'en accompagnent pas moins le joueur d'une belle façon.
Concluons cette présentation du premier opus de la quadrilogie .hack en ne perdant pas de vue que le deuxième épisode devrait à n'en point douter nous faire découvrir de nouveaux pans d'un scénario qui s'annonce fabuleux, mais aurait-il pu en être autrement de la part du scénariste du premier film de Ghost In The Shell et de Patlabor 2 ?! Pris en temps que tel, Dot Hack souffre de nombreux problèmes (de caméra notamment) et est un RPG des plus classiques. Maintenant il est très difficile de quitter une partie débutée et le fait de naviguer entre deux mondes apporte beaucoup. Le titre étant en français, sa construction ingénieuse et ses combats dynamiques, il serait dommage de passer à côté de ce soft. Après, ayez bien en tête qu'il s'agit d'un Dungeon RPG qui plus est très austère graphiquement et que si vous ne pouvez passer outre ces deux aspects, vous aurez beaucoup de mal à rentrer dans l'univers troublant et fascinant de Dot Hack // Infection.
- Graphismes12/20
Des décors vides, sans fioritures mais qui ne manquent pas d'âme. Plusieurs d'entre eux sont très originaux (avec des lignes de codes informatiques dansants dans l'air, des environnements plus gothiques...) mais les donjons que vous aurez à traverser sont longs et laborieux en terme d'esthétique, tout comme les monstres d'ailleurs ou les sorts magiques de piètre facture. Les protagonistes s'en sortent beaucoup mieux ceci dit, leur design étant un indice de poids sur leur personnalité.
- Jouabilité13/20
Les combats sont en temps réel et vous ne dirigerez que le personnage principal (tout en pouvant donner tout de même des ordres à vos compagnons), vos deux coéquipiers étant gérés par la console. Le système manque tout de même de quelques menus d'action rapides et toutes vos actions liées aux objets ou aux sorts se feront par un menu qu'il faudra au préalable ouvrir, un peu frustrant tout de même. Il y a également de gros problèmes d'angles de vues et la fonction du zoom et des rotations des caméras étant gérées par le stick droit, on a tôt fait de zoomer et dézoomer sans le vouloir. Enfin, il arrive très souvent, surtout dans les donjons, que l'angle de caméra ne puisse être modifié de façon convenable ce qui s'avère problématique. Le tout demeure cependant convivial, les combats sont dynamiques (le fait de pouvoir locker un adversaire est bien vu) et quelques bonnes idées sont au rendez-vous comme celle de l'Infection virale ou la vue subjective (peu pratique) qui permet de parcourir le jeu à la manière d'un FPS.
- Durée de vie13/20
Si vous ne sauvegardez pas constamment, si vous ne "levelez" pas un minimum vous risquez d'avoir quelques ennuis. La difficulté est assez élevée et vous devriez (à mon avis) avoir besoin d'une trentaine d'heures pour boucler le titre (si vous montez vos personnages) ou d'une vingtaine d'heures si vous y allez franco !
- Bande son15/20
Les doublages anglais sont corrects mais qu'il est idiot de donner uniquement accès, après avoir fini le jeu, aux doublages japonais !! Les musiques sont excellentes et donnent un réel cachet au jeu.
- Scénario15/20
Le point fort de Dot Hack. Privilégiez le visionnage de la première OAV avant de jouer et attendez-vous à pénétrer dans un univers où Lain aurait une place de choix. Le fait de proposer un jeu dans le jeu est excellent, le tout vous obligeant à naviguer entre les deux mondes pour avancer et on attendra avec grande impatience le second épisode pour voir comment le scénario évolue !
Un dungeon-RPG doté d'un bon scénario, en français (le doublage japonais étant à débloquer), mais souffrant de plusieurs lacunes. Voici en gros ce qu'on retire du premier épisode de Dot Hack qui en tant que RPG se dote de combats dynamiques, d'une interface perfectible et de problèmes de caméras mais qui arrivera sans peine à vous retenir devant votre écran. Un met de choix à ne pas laisser passer en attendant le second épisode, Dot Hack // Mutation...Et l'histoire continue...