Si les jeux d'aventure retrouvent une certaine santé avec plusieurs titres de qualité déjà sortis ou prévus pour les prochains mois, les jeux de réflexion pure se font toujours aussi discrets. Schizm est un de leur meilleur représentant, et c'est en partie pour ça qu'on est content de découvrir sa suite.
Les joueurs ayant eu le courage de se lancer dans le premier Schizm pourront témoigner, le jeu se classe facilement parmi les plus difficiles que l'art vidéoludique nous ait offert depuis ses débuts. Difficile dans le sens où il fallait être sacrément calé en maths pour oser comprendre la logique cachée derrière les nombreux puzzles jalonnant le parcours. A l'annonce d'une suite, je me voyais déjà en train de réviser mes vieux cours de maths, tutoyant de nouveau Pythagore, Talès et les autres, puis est arrivé la preview (précédée il est vrai d'une petite rencontre avec le producteur du jeu) qui m'a alors de suite rassuré sur un point : Schizm 2 ne serait pas aussi ardu que son aîné. Ouf ! Mais cela veut-il dire pour autant que le soft est à la portée de tous ? Peut-être pas non. Même s'il n'est plus besoin d'avoir fait maths sup, il faut tout de même être doté d'un esprit capable d'analyser clairement les mécanismes donnés pour s'en sortir, après tout est question de logique.
Le premier volet de Schizm nous plaçait aux côtés de deux scientifiques à la découverte d'une planète étrange et apparemment désertée. Pour cette suite, ce n'est plus du tout le cas. Ce coup-ci, l'histoire nous est contée de manière plus linéaire, plus claire aussi bien qu'au départ on ne sache pas bien ce qu'il se passe. Et comment le saurions-nous puisqu'on vient à peine de se réveiller dans une station orbitale, sans souvenir aucun sur les deux cents années qui viennent de s'écouler alors que l'on dormait. On apprend rapidement que la station inoccupée est en réalité notre prison et que l'on nous a placés là pour une faute de la plus grande importance. Quelle faute ? Y a-t-il moyen de réparer nos erreurs passées ? Ce sont les deux questions auxquelles vous allez peu à peu répondre dans le jeu.
Le joueur, tout comme le personnage qu'il dirige, découvrira deux peuples qui se vouent une guerre sans merci depuis de trop longues décennies. Depuis l'arrivée de vaisseaux extraterrestres en fait. Cet événement a en effet bouleversé la planète, divisant les hommes en deux clans bien distincts : les Transai ouverts au dialogue avec les extraterrestres, et les Ansala, refusant tout contact avec les arrivants. Protégé par la technologie Chameleon qui modifie votre apparence en fonction des personnes rencontrées, vous pourrez sans crainte d'être démasqué, naviguer d'un clan à l'autre, en quête des réponses qu'il vous manque. Peut-être envisagerez-vous aussi une réconciliation entre les deux tribus...
Je vous le disais plus haut, Schizm 2 adopte une linéarité incontestable dans son déroulement. L'aspect scénaristique plus travaillée nous oblige ainsi à respecter une certaine marche à suivre. De ce fait, on ne pourra pas toucher un peu à cette énigme, puis un peu à celle là avant de se tourner finalement vers un troisième puzzle. Non, ici les énigmes se dévoilent dans un ordre bien précis (à part au tout début de l'aventure) et tant que l'on n'aura pas résolu celle sur laquelle on s'arrache les cheveux depuis des heures déjà, l'histoire n'avancera pas. Dans un sens, c'est pas trop mal. Ainsi, on sait toujours sur quoi se pencher pour avancer. Et puisqu'il n'y a pas d'objet à transporter non plus (excepté, là encore, au tout début du jeu), on peut tranquillement rester devant l'écran d'une énigme sans avoir à se dire "Ah, j'ai sûrement dû louper quelque chose quelque part..." comme c'est bien souvent le cas dans les jeux d'aventure. Ici, tout ce qu'il y a à faire (si je puis dire), c'est comprendre. Comprendre à quoi ça sert et comprendre comment ça marche. C'est là tout l'intérêt du jeu. J'ouvre à ce propos une courte parenthèse concernant le choix marketing de l'éditeur d'inclure la solution complète avec le packaging. Pourquoi nous livrer directement toutes les clés des énigmes alors que tout le jeu repose sur leur découverte ? Vous me direz qu'il suffit de ne pas regarder pour contourner le problème. Peut-être, mais à moins de brûler la solution, on se trouve toujours tenté de jeter un petit oeil, juste comme ça, parce que ça fait dix minutes qu'on bloque et qu'on en a marre (inutile de nier, on fait tous ça !). Sans solution, le challenge n'est que meilleur et la satisfaction d'avoir déjoué seul les casse-têtes conçus par les développeurs fait partie de ces grands plaisirs que nous procurent les jeux de ce genre. Enfin, c'est mon opinion. Fin de la parenthèse.
Habitué à voir des jeux d'aventure se transformer en longue mais néanmoins merveilleuse séance de diapositives (comprenez succession d'écrans fixes ou de à la limité d'omni 3D), Schizm 2 surprend par l'utilisation d'un moteur 3D permettant de se déplacer librement en vue à la première personne. Généralement réservé à une certaine catégorie de jeux (les shooters pour ne pas les nommer), ce mode de représentation fonctionne plutôt bien ici. Les contrôles, grandement simplifiés, offrent le choix bien agréable de se déplacer en utilisant conjointement le clavier et la souris, ou de n'utiliser que la souris. Il suffit alors d'appuyer sur le bouton droit pour avancer, tandis que le gauche permet d'agir sur les énigmes.
Le moteur 3D utilisé a déjà fait ses preuves dans plusieurs titres puisque c'est celui de No One Lives Forever 2. Un peu dépassé techniquement et notamment par ceux des nouveaux jeux d'action qui sortent en ce moment, ce moteur suffit amplement pour un jeu d'aventure. Souffrant d'un léger manque de fluidité, il permet néanmoins d'afficher de beaux décors à l'architecture souvent complexe et mettant en valeur de belles textures, richement colorées. Les personnages méritent moins d'éloges. Leur design, certes original, se perd un peu dans un excès de fantaisie. Leurs accoutrements trop farfelus donnent franchement dans le ridicule tout comme leur démarche peu naturelle. Heureusement, on reste généralement seul pendant le jeu. Les rencontres n'interviennent qu'aux moments clés du scénario, lors de cinématiques par exemple. L'ambiance sonore est bien réussie notamment au niveau musical avec des nappes de synthés discrètement placées pour nous mettre dans une ambiance mystérieuse et apaisante. Les voix françaises donnent dans le sobre ce qui n'est pas plus mal. On évite ainsi la localisation bâclée et trop caricaturale. Tant mieux ! Au final, Schizm 2 ne déçoit absolument pas le joueur qui attendait comme moi cette suite. Si l'histoire prend quelques distances avec le scénario du premier volet, l'ambiance reste similaire, avec des énigmes tout aussi attrayantes et originales.
- Graphismes15/20
Evidemment, on est loin des tueries graphiques styles UT ou Far Cry qui affichent des moteurs graphiques et physiques aux petits oignons. Cela n'empêche que les environnements de Schizm 2 nous flattent la rétine par tant de dépaysement. Dommage que la mode locale habille les personnages d'une manière plus que ridicule.
- Jouabilité16/20
Le dernier jeu d'aventure en date se déroulant en vue en première personne (l'affreux Auryn Quest) nous faisait penser que ce mode de représentation ne convenait pas au genre. Finalement, avec du talent et l'envie de faire bouger les choses, on voit que ça passe très bien. Le maniement ne pose aucun problème que ce soit à la souris seule ou avec l'aide du clavier.
- Durée de vie14/20
La difficulté des énigmes et des puzzles peut en décourager plus d'un. Ceux qui s'accrochent trouveront une aventure un peu plus courte que la précédente.
- Bande son14/20
Le doublage français se met au service du jeu en restant assez sobre pour ne pas perturber l'esprit calme et serein qui plane de bout en bout. Les musiques elles aussi, restent en retrait et nous permettent de nous concentrer pleinement sur les puzzles.
- Scénario14/20
Bien que l'on ne sache pas grand chose de la situation, on se prend rapidement au scénario. Ensuite, l'histoire se dévoile par petits bouts à mesure que les tribus nous aident à retrouver la mémoire.
Schizm 2 nous fait renouer avec un genre de jeux un peu tombé en désuétude aujourd'hui. Bien plus jeu de réflexion que d'aventure, il propose de nombreux puzzles pour le moins originaux. Le tout est à prendre comme un défi intellectuel d'un niveau plus qu'honorable. La question est donc de savoir si vous acceptez de le relever. Pour moi, la réponse est oui !