Si vous attendiez comme le messie l'adaptation filmique de Spawn, vous savez tous qu'il y a eu de quoi être déçu car nonobstant quelques très beaux effets spéciaux, le film de Mark A.Z. Dippe ne parvenait à aucun moment à retranscrire tout ce qui faisait la force du personnage de Tood Mc Farlane. Je pense bien sûr ici du déchirement intérieur, des doutes et des questionnements tiraillant cet ange de la mort. Si on se retournera donc plus facilement du côté de l'excellente série animée (sombre, violente et dotée de scénarii travaillés), la dernière adaptation vidéoludique des tribulations de Al Simmons joue, comme on s'en doutait, la carte de l'hyper-violence avec démembrements en tout genre pour un beat'em all très proche, dans l'esprit, de la série des Hunter The Reckoning.
Spawn est au premier sens du terme un héros mais quand on y regarde de plus près le personnage tient beaucoup plus de l'anti-héros (comme Wolverine pour ne citer que lui) et se pare d'une psychologie complexe, tiraillée entre sa nature démoniaque et son ancienne existence, qui fait de lui l'ater-ego du Dark Knight mais de l'autre côté du Styx. Comme je le disais plus haut, le film n'aura pas vraiment rendu hommage à ce personnage des plus charismatiques et si l'adaptation vidéoludique profite des conseils éclairés de Todd McFarlane en ce qui concerne l'aspect scénaristique (le tout s'inspirant également des 99 premiers comics de la première série), Spawn Armageddon ne profite malheureusement pas du matériau de base et nous sert un beat'em all quelque peu fade, linéaire et qui ne convainc pas vraiment.
Dans l'absolu, on pouvait donc penser retrouver ce bon vieux Al, égal à lui-même, doté de pouvoirs immenses et ne répugnant pas à faire verser quelques hectolitres de sang pour témoigner de sa présence. En l'état, et bien nous avons droit à tout ceci, c'est déjà ça de pris. Le scénario s'appuie donc sur une trame classique (les forces du mal attaquant la Terre dans le but de l'asservir) mais arrive malgré tout à dispenser un brin de plaisir de par le simple fait de retrouver par exemple de vieux ennemis comme le Violator ou le maître de Spawn, Malebolgia. Dommage donc que la mythologie de Farlane ne prenne vie qu'au travers d'un beat'em all des plus ordinaires, qui sans être mauvais, se veut trop conventionnel pour susciter l'intérêt chez les néophytes (de Spawn ou du genre vidéoludique susnommé).
Du background aux possibilités en passant par l'aspect gore (les gerbes de sang tout comme les démembrements sont légions), on se retrouve en plein dans une ambiance à la Hunter : The Reckoning. Sur les 23 missions constituant le titre, une bonne partie d'entre-elles se passeront donc dans les ruelles de New-York sordides à souhait et infestées de démons. On passera ainsi son temps à user des 8 armes (du fusil à pompe à la mitraillette, le canon à souffre, etc.) et des 5 pouvoirs du héros pour répandre de la tripaille à chaque coin de l'écran. Mais ce qui est censé être jouissif se montre des plus soporifiques passés une dizaine de niveaux tant le tout est redondant (aussi bien dans les graphismes que dans les possibilités). On peut bien sûr varier les plaisirs en alternant armes et pouvoirs (sachant qu'il convient parfois d'user d'une bonne vieille hache plutôt que d'un lance-roquettes contre des adversaires rapides) mais au final le tout manque cruellement de saveur sachant que les ennemis sont très rentre-dedans et qu'ils ne jouissent pas d'une IA des plus élaborées. Cet état de faits est accentué par le fait que toute l'aventure se passe dans des niveaux extrêmement cloisonnés, l'ironie du sort étant que vous aurez droit à de gigantesques jetons lumineux pour vous indiquer le chemin à prendre, bref vous n'aurez que peu d'occasion de vous perdre et si vous pouvez parcourir le titre dans trois modes de difficulté, l'aventure est de courte durée. Ceci dit, comme dans tout bon beat'em all, une pléthore de bonus(couvertures de comics, galeries...) seront à débloquer en ramassant divers items durant les parties. A ce sujet, il sera bon de s'occuper de tous les éléments destructibles de chaque level pour dénicher munitions et objets vous redonnant vie et énergie spectrale (celle-ci vous permettant d'user de vos pouvoirs).
Si le principe est basique (ce qui est un peu navrant car The Mark Of Kri, Chaos Legion ou Devil May Cry 2 -si si !!- ont démontré qu'on pouvait faire de très bons jeux sous couvert d'innovation ou d'ambiance peaufinée), l'univers graphique est dans le même ordre d'idées. Qu'il est donc frustrant d'évoluer dans des niveaux mille fois vus ailleurs qui s'ils demeurent variés n'en sont pas moins moyennement convaincants aussi bien dans la technique mise à disposition du titre que du plaisir visuel qu'on pourra ressentir en dirigeant Spawn. Bref, pour ceux qui s'intéressent au sujet, vous aurez le loisir d'évoluer dans Central Park (sous la coupe des ténèbres), sur un port, dans divers hangars, en Enfer ou dans une station spatiale. En dehors des décors, les mouvements de Spawn sont par contre relativement convaincants même si ce dernier ne dispose pas de beaucoup de possibilités. Précisons d'ailleurs qu'il est frustrant de ne pouvoir utiliser la célèbre cape du vengeur que pour planer !
Outre le fait de straffer en tirant (à l'instar de Dante), vous pourrez utiliser vos chaînes pour atteindre des endroits en hauteur ou amocher vos ennemis. Les pouvoirs dont je vous parlais plus avant vous seront d'une aide précieuse pour toucher vos ennemis à distance et hormis les tirs classiques d'énergie, on retrouve de plus un pouvoir vous permettant de vous déplacer plus vite, vos ennemis, eux, bougeant au ralenti. Le tout est maniable, enfin pour ce qui est passer d'une arme ou d'un pouvoir à l'autre et si on ne constate pas de réels problèmes les caméras auraient vraiment du bénéficier d'un peu plus de soin dans la gestion manuelle qui est un peu rapide à mon goût. A ce titre, nous n'éviterons pas non plus quelques blocages dans des endroits réduits et une vue trop proche du personnage. Pas vraiment mauvais mais loin d'être un hommage vibrant au personnage de Spawn, le titre de Namco est un petit beat'em all sans grande envergure aux inspirations certes gigantesques mais qui ne donnent finalement que des aspirations pour le moins mesurées et limitées. On était en droit d'attendre beaucoup mieux d'un jeu mettant en scène le commanditaire du maître des Enfers.
- Graphismes12/20
7 environnements (entrepôt, Enfer, station spatiale, Central Park) pour très peu de dépaysement, au regard de ce qu'on trouve dans la plupart des beat'em all. Le titre est vide, les ennemis n'arrivent pas à convaincre et seules les animations de Spawn (qui évoluent par exemple en fonction des armes qu'il porte) et deux ou trois effets spéciaux s'en sortent honorablement.
- Jouabilité12/20
On court, on saute, on tire. Vous me direz, nous sommes dans un beat'eam all et il n'en faut pas plus. Ceci dit, la gestion de la caméra est perfectible (cette dernière tournant trop vite) et votre héros dispose au final de peu de mouvements. Les armes et pouvoirs spéciaux pallient malgré tout un peu cet aspect et le système de sélection rapide des armes ou des pouvoirs est simple d'accès.
- Durée de vie11/20
23 missions pour trois modes de difficulté. Dans l'ensemble le jeu est très dirigiste, les niveaux ne sont pas très vastes et le tout étant linéaire, vous en viendrez assez vite à bout. Reste plusieurs bonus sympathiques à débloquer dont des couvertures de comics, indispensable pour tout Spawnophile qui se respecte.
- Bande son13/20
Le doublage français n'est pas mauvais et les bruitages tout comme les musiques accentuent l'impression de furie et rage qui se dégage de ce titre mais rien ne confine au génie.
- Scénario11/20
Si le jeu s'appuie sur les 99 premiers comics de la série et que Mister McFarlane, himself, a participé à l'élaboration du scénario, le tout teinte comme un air de déjà-vu. Franchement, toute cette ambiance malsaine est bien mieux retranscrite dans la série animée ou les comics.
Sans réel atout dans sa manche, Spawn Armageddon est destiné à être noyé sous la masse des beat'em all ou jeux d'action sortant sur le support. Ne profitant pas vraiment de l'ambiance et du personnage sortis de l'imagination du génial McFarlane, le titre ne réjouira qu'une poignée d'irréductibles désireux d'obtenir en un simple clic la centaine d'arts et de couvertures propres au superbe anti-héros qu'est Al Simmons.