Pourquoi imposer un nom aussi peu accrocheur que Roger Lemerre à une simulation de management de clubs de football déjà bien entamée du fait de l'affection toute relative que portent les joueurs à ce type de soft. Pourquoi ne pas conserver le sobre LMA Manager 2004 sévissant dans le reste du Monde ? Surtout lorsque l'homme en question n'est plus vraiment en rapport direct avec le paysage "footballistique" de nos contrées. Non, en ce moment, il semble préférer la boxe. Mais sera t-il aussi combatif dans ce nouvel opus de sa série instaurée par Codemaster ?
Tout d'abord, ce qui subjugue dans LMA Manager 2004 (pour ne pas employer tout le temps Roger Lemerre, il doit y avoir des droits...), sont les myriades de tableaux, de graphiques, de données, donnant l'impression de se trouver devant le tableau de commandes d'une centrale nucléaire lors de la surchauffe d'un réacteur. Mais on retrouve rapidement sa lucidité pour se rendre compte qu'il s'agit en fait plus de proposer une liste exhaustive d'options plutôt que de chercher inutilement une complexité rebutante. En effet cet opus désire visiblement s'ouvrir davantage aux réfractaires de la gestion, plus adeptes des coups-francs en pleine lucarne dispensés par leur soin. Bénéficiant d'un moteur 3D de bonne qualité, il vous sera possible d'admirer, sous la forme de retransmission, le match pour lequel vous vous êtes, ardemment préparé toute la semaine. Sans être révolutionnaire, ce principe apporte un peu de dynamisme aux menus moroses, et permet de prendre part à l'ambiance particulière des matches à grand spectacle. Assis sur le banc de touche comme tout entraîneur qui se respecte, vous ressentirez un plaisir sadique à crier vos ordres à vos poulains apeurés, d'une simple pression sur une des touches de votre pad. Par exemple, R2 provoque une attaque massive, tandis que R1 implique un jeu en balles longues. Un apport intéressant, qui sans relancer l'intérêt d'une vision au coeur de l'action déjà présente dans la version 2003, adjoint une certaine immersion, et le sentiment de participer à la victoire de votre équipe. De plus, cette version Xbox permet l'utilisation du Voice Communicator, afin de hurler vous même vos ordres. Jouissif. Mais si la vue de ces corps musclés s'affairant sur un terrain herbeux vous rebute, il vous est tout à fait possible de passer la rencontre et ainsi aboutir directement au résultat final. Malheureusement, et de manière incompréhensible, vous serez tout de même obligé d'attendre la fin de l'affrontement. La patience est alors de mise, car cela dure au moins trois ou quatre minutes, et qui plus est sans images, ni commentaires. La solitude se surprend alors à pointer le bout de son crampon. Mais ne vous laissez pas abuser, l'heure tourne (je ne dis pas ça concernant mon test).
Même si vous vous laissez happer par la beauté froide des menus déroulants, le monde continue de tourner autour de votre personne. Tout évolue très vite dans le pays joyeux du sport collectif. A contrario de ce que l'on pourrait penser de prime abord, la semaine passe bien vite, et vous jubilerez à chaque nouvelle matinée, courant fiévreusement vers votre boîte mail, afin de lire vos dernières propositions, et les nouvelles fraîches concernant les transferts et les rapports d'enquêtes de vos observateurs. Ces derniers, pierre angulaire de votre stratégie peuvent être envoyé n'importe où dans le monde, oeuvrant dans le but de vous fournir des renseignements sur un club, ou un joueur en particulier. Soumis aux aléas de votre caractère, de la même manière que vos chers (c'est peu dire)poulains, ceux-ci peuvent être recrutés à grands renforts d'euros, ou bien tout simplement renvoyés. Une logique marchande s'appliquant à l'ensemble du titre. Vous chercherez en fait la plupart du temps, mis à part les préparations d'avant match, à entretenir vos finances de préférence dans le registre excédentaire. Le choix d'un sponsor, l'aménagement du stade, la construction de nouveaux bâtiments, le choix d'une personne chargée de la communication, tout concours à faire appel à votre science de l'économie. Gérer son budget n'est pas si simple, aux vues des nombreux athlètes alléchants mis à votre disposition dans le "mercato", renouvelé deux fois pendant la saison. D'un prix souvent exorbitant, il vaut mieux vous rabattre sur les jeunes gens prometteurs, que vous serez chargé de remarquer bien entendu. Néanmoins bon entraîneur suppose également pédagogue talentueux et meneur d'homme astucieux. N'oubliez jamais que vos protégés disposent d'une jauge correspondant à leur moral général. Il serait dommage de perdre un titre comme la coupe de l'UEFA à cause d'une atmosphère dépressive accentuée. Et ce n'est pas l'entraînement pourtant peu avare en types d'échauffements qui leur fera oublier leur désarroi. Mais cette quasi orgie de possibilités, ce parangon de l'omniscience du ballon rond, ne cacherait-il pas un lourd passé.
C'est ce que l'on a légitimement le droit de penser après un épisode 2003 en demi-teinte. Ne faisant acte que de fort peu d'originalités, il s'était cantonné malgré lui dans une refonte simpliste de l'opus 2002. La leçon n'a apparemment pas été retenue, car le titre qui nous intéresse aujourd'hui réitère les erreurs du passé. Certes, quelques ajouts notables, cités ci-dessus remettent sur sa piste un intérêt titubant, mais ne suffisent pas sincèrement à justifier le développement de cette "nouvelle"version. Le renouvellement des statistiques en accord avec l'actualité, base avouée de ce genre de jeu est une obligation presque vitale, mais n'empêche pas de se dire que si le online était un peu plus démocratisé dans notre pays, nous n'aurions peut être pas besoin de débourser 60 euros pour effectuer une simple mise à jour. Ce n'est qu'une piste, mais proposer un tel service via Sony serait une chose intéressante. Cependant, Roger Lemerre 2004 (je l'ai fait), n'est pas un mauvais soft, loin de là. Doté d'un "gameplay" intuitif, d'une navigation entre les menus extrêmement simple d'accès, et d'une richesse affolante, il se place encore et toujours dans le trio de tête des titres de gestion de foot. La gageure est maintenant de faire comprendre aux amateurs pourquoi la série évolue si peu, et dans quelle mesure doit on parler de jeu à part entière ou de simple add-on. Roger s'essoufle vite.
- Graphismes15/20
Bénéficiant de l'ajout d'un moteur 3D rénové lors des phases décrivant l'action même des rencontres, Roger Lemerre 2004 propose une interface lisible, colorée et mise en valeur de manière intelligente. L'important est de ne pas être réfractaire à l'amas de menus.
- Jouabilité16/20
Des possibilités gigantesques, et une navigation relativement aisée, qui aurait peut-être méritée un tantinet plus de dynamisme. Rien ne remplace une souris et un bon clavier. Le fan trouvera aisément son bonheur et le novice sera sûrement attiré par l'exhaustivité du titre. A noter que l'utilisation du microphone est un petit plus bien agréable.
- Durée de vie15/20
Des heures et des heures de plaisir quand il vous semble nécessaire de configurer le moindre remplaçant en prévision du match se jouant dans trois semaines, sachant que le meneur se doit d'être préparé pour une rencontre plus importante. Les saisons se suivent et ne se ressemblent pas.
- Bande son8/20
Les commentaires de Didier Roustan font passer le doubleur de Snake dans Metal Gaer Solid sur Psone pour un artiste de génie, et les injonctions de l'entraîneur durant les rencontres ne sont pas du tout convaincantes. Ne cherchez pas de compositions musicales, vous seriez déçu. Une austérité sonore navrante.
- Scénario/
Ah Roger, mon petit Roger, tu nous auras fait rêver durant toutes ces années. Cet interlude nostalgique passé, il est navrant de constater, malgré quelques innovations sympathiques, l'absence de réelles nouveautés relançant un tant soit peu l'intérêt du produit. Toujours aussi complet, facile d'accès et prenant, il ne justifie pourtant pas l'appellation de suite, mais plutôt de complément. Il est certain que tous les fans, appâtés par la mise à jour des marchés et des statistiques ne regarderont pas ce défaut de la même manière, mais sous sa couche de tendre friandise se cache un coeur de déception. Un achat de qualité, mais pour combien de temps ?