Pourquoi Zelda est-il LE jeu de la GameCube ? Qu'est-ce qui pouvait donner à Shigeru Miyamoto l'assurance, dès la première présentation du jeu, que son nouveau Zelda serait un mythe, alors même que les fans s'insurgeaient du nouveau design de cet épisode ? Pourquoi Link ne parle-t-il jamais et comment parvient-il à séduire la princesse Zelda dans sa panoplie ridicule de lutin des bois ? Autant de questions qui trouveront leur réponse ici... enfin presque toutes.
Après avoir tenté une approche de dissection sur la version japonaise du jeu il y a quelques mois sous forme de dossier, que reste-t-il à dire pour le test du tant attendu Zelda : The Wind Waker ? Tout. Impossible de révéler les meilleurs secrets du jeu sans vous gâcher la surprise de les découvrir par vous-même. Difficile d'approcher certains aspects novateurs du soft sans en oublier la moitié. Zelda, c'est le jeu que tout le monde a pré-commandé ici, celui dont on évite de parler parce qu'il y aurait tant à dire, celui enfin qui déchaîne les passions et justifie à lui seul notre statut de défenseurs du jeu vidéo en général.
Tout commence par un prologue totalement inattendu sous forme de fresque murale, présentant le héros de la légende qui vainquit jadis Ganon et sauva la Triforce. La légende se perpétue alors une fois de plus à travers un jeune garçon aux oreilles pointues qu'il n'appartiendra qu'à vous de nommer Link. L'elfe aux cheveux ébouriffés atteint en ce jour l'âge de 12 ans qui lui confère le droit de revêtir bien malgré lui l'habit du héros tricoté par sa dévouée grand-mère. Très vite, le nouveau monde de Zelda impose sa touche décalée aux yeux du joueur. On s'efforce de ne pas faire attention au mioche qui nous suit à la trace avec une affreuse sécrétion nasale sur le visage, on évite de croiser le regard malicieux de la mystérieuse Tétra et de ses idiots de pirates, on laisse la jeune princesse des Piafs se jucher sur nos épaules parce que c'est pour la bonne cause, et puis on évite enfin de s'immiscer dans les disputes du vieux maître d'armes survitaminé et de son frangin surdoué à la tête qui enfle. Tout est normal, nous sommes dans le nouveau monde de Zelda.
Bien sûr, en plus de ces personnages inédits totalement irrésistibles dans leur apparence et dans leurs réactions, on ne manque pas de croiser à nouveaux quelques têtes connues comme l'incontournable arbre Mojo, le poisson Jabu-Jabu, le diabolique Ganondorf, les impressionnants chevaliers "tarés" de Zelda 2 sur Nes et même la ravissante princesse Zelda… Le lutin des bois Tingle revient avec de nouvelles astuces dont pourront tirer partie ceux qui possèdent une GBA, mais on peut très bien terminer le jeu sans s'en préoccuper. Premier intérieur visité chez la mémé de Link et c'est déjà la première claque : le voile de chaleur dynamique autour du chaudron, le bruissement des arbustes qui se secouent et perdent leurs feuilles, et surtout la vaisselle qu'il est facile de pousser par inadvertance en sautant sur une table pour voir ensuite les tasses tournoyer sur le rebord avant de se briser au sol, témoignant d'une gestion des collisions et des interactions qui dépasse le simple réalisme. Et puis ce sera ensuite la lumière vacillante des torches, les changements spectaculaires des conditions atmosphériques, ou encore les armes que l'on peut subtiliser aux ennemis pour les retourner contre eux ou multiplier les interactions avec le décor.
Impossible de rester de marbre devant l'approche délirante de ce nouvel opus. Les cochons remplacent les poules des précédents volets, mais font aussi bien l'affaire quand il s'agit de se défouler sur des êtres sans défense. Mais attention, leur apparente tranquillité dissimule un caractère particulièrement agressif, et ils ne manqueront pas de se défendre en hurlant et en lâchant des substances nauséabondes si vous rampez discrètement pour les attraper. On raconte qu'ils pourraient même voir rouge si vous avez l'audace de les frapper.
Rarement on aura vu autant de mini-games et de quêtes annexes dans un épisode de Zelda. Ça va du simple jeu de Taquin à la découverte de trésors en pleine mer en passant par les traditionnels échanges d'objets et autres péripéties débiles à souhait. L'intérêt est de les résoudre régulièrement tout au long de l'aventure, de façon à suivre une progression extrêmement variée et ne pas se retrouver avec des quêtes fastidieuses en fin de jeu, et des heures à passer pour traverser toute la carte en bateau. C'est seulement en appâtant les poissons régulièrement qu'on aura plaisir à dévoiler la map au fur et à mesure en tentant de repêcher un trésor dès que l'occasion se présente.
Plus que jamais, Zelda se caractérise par le Plaisir de jeu avec un grand P. Pas seulement pour ce qui est de l'originalité de la progression, mais surtout à travers toutes les possibilités d'action qu'il serait trop long d'énumérer ici et dont vous pourrez toujours avoir un aperçu dans le dossier. Les scènes d'action se savourent vraiment à travers les attaques combo, la contre-attaque spéciale, l'utilisation intelligente du bouclier, les roulades d'esquives, tout cela grâce à l'excellent système de lock. Même les traditionnels items tels que le boomerang, l'arc et les flèches, ou encore les bombes trouvent ici de nouvelles utilités, et sont complétés par des objets totalement nouveaux comme la feuille Mojo et la baguette du vent. Cette dernière remplace d'ailleurs efficacement l'ocarina des versions 64 bits en tirant partie de la présence d'Eole. C'est le gameplay quasi parfait des opus N64 qu'on retrouve ici de façon transcendée.
Vous n'êtes d'ailleurs pas sans savoir que ce nouveau Zelda sort également dans une version collector qui comporte une conversion GameCube d'Ocarina of Time, toujours aussi fascinant à jouer aujourd'hui. On retrouve avec nostalgie tout ce qui nous avait marqué à l'époque : son scénario imprévisible axé sur les deux âges différents de Link, le secret de la princesse Zelda, l'infiltration de la forteresse Gerudo, les chevauchées sur le dos d'Epona et surtout cette atmosphère parfois franchement angoissante caractéristique de cet épisode, ne serait-ce qu'à travers la présence d'ennemis qui ne manquent pas de faire sursauter comme les araignées skulltulas qui tombent des plafonds obscurs ou encore les goules qui vous sautent à la gorge dans les cryptes. L'épisode inédit Master Quest, également inclus dans cette version collector, reprend de façon très similaire le chapitre Ocarina of Time en y ajoutant quelques différences dans les donjons, avec notamment la présence de nouveaux monstres qui relancent un peu le challenge pour ceux qui ont déjà terminé Ocarina Of Time une dizaine de fois.
Que dire de plus sinon qu'il s'agit là d'un des rares jeux sur lesquels on se surprend à passer des journées entières non-stop sans voir le temps passer ne serait-ce qu'une seconde. The Legend of Zelda était déjà une série culte, The Wind Waker la transcende avec une légèreté quasiment inespérée.
- Graphismes19/20
Un style totalement novateur qui donne à la série une nouvelle vigueur en lui conférant une approche davantage tournée vers l'humour et en renforçant les expressions de visage.
- Jouabilité20/20
Le gameplay quasi parfait des opus N64 optimisé de bien belle manière pour la GameCube, avec un contrôle total de la caméra. La référence en matière de plaisir de jeu.
- Durée de vie18/20
Aucune longueur dans l'aventure tant la progression est variée, les quêtes annexes nombreuses et l'atmosphère ultra prenante. En ayant le bon goût de vous procurer la version collector, vous aurez même accès à Ocarina of Time et l'inédit Master Quest.
- Bande son19/20
Des mélodies inédites mais aussi certaines musiques directement importées des opus précédents ou carrément remixées. Vite, il faut que je trouve l'OST !
- Scénario18/20
Au-delà des rebondissements et autres péripéties incontournables de la saga Zelda, cet opus puise surtout son charme dans l'originalité de son univers et son humour omniprésent. Par rapport à la version jap, on ne trouvera pas de correspondance entre l'alphabet occidental et la graphie runique du monde de Zelda, on ne peut donc plus tenter de traduire certaines inscriptions mais ça tient évidemment du détail.
Pour une fois, je me permettrai de défier quiconque de jouer à Zelda : The Wind Waker et de prétendre en sortir déçu. Posséder la console de Nintendo et ne pas tenter l'expérience vous ferait perdre toute crédibilité. Et puis rien n'empêche les autres de se rattraper en jetant leur dévolu sur le pack GameCube Platinum + Zelda version collector.