Si tous les maux n'ont pas de remède, ils ont tous une origine. Qui aurait pu se douter que derrière la façade polie d'une entreprise pharmaceutique, se terraient des hommes se prenant pour des dieux ? La vérité fait parfois mal, mais aussi terrifiante soit-elle, elle se doit d'être révélée et s'il faut pour cela se replonger une fois encore dans les ténèbres insondables d'un mystérieux manoir, alors l'hésitation n'est plus permise, et il ne reste plus dès lors qu'à pousser la lourde porte de Resident Evil 0 (RE 0).
Vous incarnez Rebecca Chambers, un membre de l'équipe Bravo des STARS, une unité spéciale de police de la ville de Raccoon City. On vous a envoyé, vous et votre équipe, enquêter aux abords de la forêt qui jouxte la ville, sur une série de meurtres bien étranges. Malheureusement rien ne se passe comme prévu. Après le crash de votre hélicoptère, l'équipe Bravo qui s'en sort miraculeusement, n'en démord pas et continue ses investigations alentours. Non loin de là, Rebecca découvrira un train qui a déraillé et qui a été investi par des abominations en tout genre. Pour vous aider dans la tourmente, un bien étrange fugitif du nom de Billy viendra vous prêter main forte, et ensemble vous aurez peut-être une chance de sortir vivants de ce cauchemar.
Vous n'êtes pas sans savoir, que cet énième épisode de la série des Biohazard représente en quelque sorte le génome manquant, la pierre angulaire de la série, dans le sens où il se doit de répondre à diverses questions concernant notamment l'origine du virus T. Seulement voilà, si on pouvait s'attendre à des trésors d'ingéniosité qui nous auraient servi sur un plateau d'argent un scénario mêlant habilement rebondissements en série et révélations en tout genre, on se retrouve finalement en présence d'un plateau télé alors qu'on était en droit d'attendre un mets de premier choix. RE 0 cache bien en son sein son lot de révélations, mais celles-ci ont plus à voir avec l'épisode en lui-même qu'avec la mythologie de la série. Il est vraiment réjouissant de retrouver des personnages, comme Rebecca, Enrico, l'emblématique Albert Wesker, rencontrés au détour des précédents opus, il est intéressant de constater les jonctions entre cet épisode et l'épisode originel de la série, mais le moins que l'on puisse dire, si on est un tant soit peu objectif, c'est que la peur engendrée par les segments précédents s'est effacée au profit d'une once d'action supplémentaire dans cet épisode 0. On est d'ailleurs en droit de se demander pourquoi Capcom n'a pas repris les très bonnes idées de chaque jeu qui a précédé RE 0. Je pense notamment aux deux scénarios distincts, au monstre récurrent nous poursuivant sans relâche durant toute l'aventure, au port simultané de deux armes, ou encore à l'utilisation d'une arme défensive. D'autant plus étrange que RE 0 est bien un véritable melting-pot de tous les épisodes de la série ayant vu le jour à l'heure actuelle (en faisant abstraction du RE Gaiden et de la série des Survivor).
Si certaines scènes sont indéniablement des clins d'oeil aux autres opus (voir la scène du piano entre Rebecca et Billy qui renvoie à celle entre la même jeune femme et Chris dans le premier RE), d'autres par contre sont là pour souligner l'absence de créativité de la part des scénaristes, tant elles semblent redondantes avec d'autres moments clés des divers RE. Bref on est loin, très loin de l'ambiance de RE : Code Veronica, qui, à mon sens, est le meilleur titre de la série. La principale innovation de cet épisode vient du fait qu'on peut à tout moment « zapper » entre les deux personnages principaux de l'aventure. Ainsi, vous devrez combiner les talents de Billy et Rebecca pour résoudre des énigmes et avancer dans le jeu. Et qui dit duo, dit double puissance de feu (du moins dans la série de Mikami), et cette dernière sera prétexte à de nombreux affrontements tout au long du jeu, contre des hordes de zombies, des kyrielles de hunters ou bien encore de nouveaux venus comme des crapauds géants, des monstres ayant le bras long (!!) ou bien des babouins génétiquement modifiés. Dommage à ce sujet, que le bestiaire n'ait pas été agrémenté de plus de créatures, enfin bon j'avoue que je chipote un peu.
Autant on peut reprocher à RE 0 un manque au niveau du scénario, autant on reste coît devant la beauté graphique du titre. Le jeu se pare d'une robe magnifique et chaque écran fourmille de détails. Il faut voir ces gouttes de pluie s'écraser sur les vitres du train dans lequel vous débutez votre aventure, cette simple casserole remplie d'eau qui voit sa surface onduler au gré du mouvement des wagons, etc. RE 0 glorifie à lui tout seul la beauté macabre de la mort, des ténèbres. Le dernier opus magnifie la crasse, la poussière et les abominations génétiques, une sublime dichotomie artistique. De même, on s'extasie devant les cinématiques proprement hallucinantes et regorgeant de moments gores, tous plus superbes les uns que les autres. On pardonnera, par contre, à Capcom, l'aliasing présent durant les cut-scènes utilisant le moteur de jeu et la raideur des personnages qui n'ont pas beaucoup évolué de ce côté-là depuis le premier épisode. Si vous vous demandez également ce que vaut la bande-son, je vous rassure, elle est toujours aussi superbe dans sa discrétion et les thèmes lancinants laissent place à des compositions plus nerveuses lorsque la situation l'exige.
Les fans de la série ne seront aucunement dépaysés par le gameplay de cet épisode, et ce malgré les nouveautés apportées. Le maniement des personnages est toujours aussi particulier (surtout pour faire avancer ces derniers) mais montre en main, il ne vous faudra pas plus de 20 minutes pour saisir toutes les nuances proposées par le soft. Mais le gros point provient du fait qu'on peut changer de personnage à tout moment de l'aventure. Fini les balades en solo, au-revoir la pénurie d'armes au moment crucial, adieu les coffres de rangement. Cet épisode instaure un nouveau système, le zapping, qui révèle vite de nombreux points forts et quelques faiblesses.
Pour être franc avec vous, durant les premières minutes de jeu je n'ai pas arrêté de pester contre l'absence des coffres, car dans ce Resident Evil, il conviendra de bien choisir les objets qu'on porte sur soi et de laisser les autres à l'abandon, quitte à venir les rechercher plus tard. Cela vous oblige à établir une stratégie, car il sera assez fréquent que vos personnages soient obligés de se séparer pour mener à bien un objectif. Ainsi, il sera très important d'échanger des objets (en passant par le menu inventaire, attention par contre, car pour se faire, il faut obligatoirement que vos personnages soient l'un à côté de l'autre) et de bien répartir, par exemple, le nombre de balles, les sprays ou les clés.
Ce qui est très ingénieux dans cette histoire, c'est la complémentarité des héros. Alors que Billy se veut plus résistant au combat et qu'il est à même de pousser de lourds objets, Rebecca, elle, peut entre autre combiner des herbes, ce qui vous obligera à continuellement passer de l'un à l'autre et à se retrouver à un endroit précis pour participer à une petite séance de troc. L'autre aspect intéressant de cette coopération, est que vous pouvez à tout moment ordonner à votre compagnon de rester à un endroit pendant que vous irez à un autre. De plus, il est possible de jouer sur le degré coopératif de votre comparse. Si vous ne voulez pas que Billy ou Rebecca (selon le personnage joué) vous vienne en aide durant un combat, il suffira de mettre votre compagnon en « passif » pour que celui-ci ne tire pas pendant les affrontements. Si cette option ne sert pas à grand chose en mode Easy, elle prend tout son sens dans les modes Normal ou Hard où il sera indispensable d'utiliser vos balles avec parcimonie.
En tant qu'inconditionnel de la série de Shinji Mikami, je ne peux que vous conseiller cet épisode, car aussi paradoxal que cela puisse paraître, même si le dernier épisode en date des Resident Evil déçoit d'un point de vue scénaristique, si les somptueux environnements, de même que les énigmes, ont un air de déjà-vu, on prend toujours autant de plaisir à arpenter ces sombres couloirs, à résoudre des énigmes quelque peu éculées et à user du fusil à pompes pour bien faire rentrer dans la tête de ces zombies que vous êtes le patron. Une fois de plus, Capcom nous gratifie d'un segment, certes peu original, mais diablement jouissif, alors pourquoi bouder notre plaisir ?
- Graphismes18/20
Chaque écran de jeu ressemble à un tableau de maître, le moindre petit détail est peaufiné à l'extrême, et si le jeu semble avoir bénéficié d'un peu moins de soins que le premier épisode Gamecube (cette impression est peut-être due au fait que les environnements sont moins variés), cet épisode 0 est un vrai régal pour les yeux. Ce jeu est une véritable apologie visuelle du désordre, de la saleté, du macabre.
- Jouabilité17/20
On retrouve la maniabilité propre à la série. Vous pouvez tout aussi bien utiliser le stick analogique que la croix directionnelle (à préconiser) pour diriger vos personnages. Notons que si les deux héros sont ensemble, vous pouvez les contrôler tous les deux simultanément en utilisant le stick C pour le personnage secondaire et l'un ou l'autre des choix énoncés un peu plus haut pour le personnage principal. C'est tout sauf évident, et il est plus simple de laisser la console diriger le second personnage, mais l'option a le mérite d'être présente.
- Durée de vie13/20
Entre 8 et 9 heures pour finir le jeu. Evitez le mode Easy qui est bien trop simple et qui gâcherait complètement la découverte du titre. Une fois le jeu terminé une première fois, un nouveau mode se débloque, le Leech Hunter, très orienté action.
- Bande son16/20
A l'instar d'un Tomb Raider, les compositions sont très discrètes lors de vos pérégrinations et s'accordent quelques envolées tonitruantes durant les combats. Les bruitages sont toujours aussi convaincants et entre les râles des zombies et les cris stridents des hunters, votre ouie sera mise à rude épreuve.
- Scénario12/20
Si on obtient plusieurs révélations sur la naissance du virus T, les gros coups de théâtre sont inhérents à cet épisode et il est vraiment dommage de constater à quel point RE 0 pêche à ce niveau-là. Pour comparaison, vous en apprendrez bien plus sur Umbrella et l'univers de BioHazard en finissant RE : Code Veronica.
Resident Evil 0 n'est qu'une étape de la série. Le jeu distille toujours autant cette atmosphère angoissante et prenante, les graphismes sont magnifiques, le gameplay s'enrichit de nouvelles options, mais on a la désagréable impression que le titre aurait, malgré tout, pu bénéficier de plus de soins, surtout au niveau du scénario ou des énigmes ou ennemis rencontrés. De ce fait, on espère vraiment que Resident Evil 4 se positionnera comme une étape charnière de la série et nous étonnera tout autant que le premier Resident Evil en son temps. Au vu de la première vidéo disponible sur le net, ceci semble très bien parti. Vous avez tous les atouts en mains messieurs de chez Capcom, faites nous frémir une fois encore.