Comme c'est étrange. Ma GameCube ne semble pas fonctionner aujourd'hui. Elle qui m'a fait vivre de si bons moments grâce aux fabuleux Rogue Leader et Resident Evil, se met subitement à me cracher à la figure un titre laid, inintéressant et bourré de bugs.
Qu'est ce que c'est que ça ? se dit-on en regardant d'un oeil intrigué la jaquette du jeu. Un gros bonhomme jaune aux bras démesurément longs, au sourire béat, aux oreilles décollées et au crâne pratiquement chauve où seuls quelques cheveux se battent gentillement en duel, y est fièrement imprimé. Doshin doit être son nom et si j'en crois le titre du jeu, il s'agit probablement d'un géant. Et bien ça promet les amis ! Et malgré ma taille impressionnante de 2m48 à genoux, l'identification avec ce personnage risque de ne pas vraiment se faire tout de suite. Enfin, allumons tout de même la console et voyons de visu ce que Nintendo nous a réservé en compagnie de ce bibendomme tout jaune.
Au début, j'ai cru à un gag. J'ai pensé que Nintendo se fichait de nous avec ce titre aussi vide intrinsèquement que visuellement. Mais non, Doshin The Giant est bel et bien un titre que Nintendo compte imposer et vendre en Europe. Au secours ! Laissez-moi vous expliquer les raisons de ma détresse. Fervent défenseur de l'esprit Nintendo depuis ma tendre jeunesse, je me fais toujours une joie de découvrir les nouvelles productions du géant nippon (on parle de l'éditeur, là). Si Nintendo s'est fait le roi des suites à rallonges avec de nouveaux épisodes de ses personnages fétiches, on lui doit également la création de nouveaux concepts de jeux frais et novateurs. Les derniers exemples en date ne sont autres que Pokémon et Pikmin. Alors bon, même si je ne suis pas un grand fan de ces deux derniers jeux, lorsqu'un nouveau titre made in Nintendo fait son chemin jusqu'à la rédaction, c'est avec une certaine curiosité que je m'empresse de découvrir ce que l'éditeur nous a réservé de novateur.
Pour Doshin The Giant, Nintendo est parti dans un délire difficilement compréhensible pour nous pauvres européens. Selon le pseudo scénario du jeu, une légende raconte qu'un géant apparaîtrait chaque jour sur l'île de Barudo afin de venir en aide aux habitants en leur plantant des arbres et en modelant le relief à leur bon vouloir. En s'appuyant sur cette simple idée, Nintendo a bâti son jeu en oubliant cependant une toute petite chose de rien du tout : ce n'est pas super marrant d'incarner un gros bonhomme qui passe son temps à répondre aux exigences des villageois ! Car c'est bien de ça dont il s'agit. Doshin The Giant n'est rien d'autre qu'une bête simulation de larbin. « Doshin, on aimerait bien un arbre ici ! », « Doshin, le sol n'est pas assez élevé par là ! », « Doshin, cet arbre me gêne pour construire ma maison ! ». Brave comme il est, Doshin obéit et récolte ainsi des petits coeurs sensés représenter l'amour que lui portent les habitants de l'île. Lorsqu'il gagne assez d'amour, Doshin grandit un peu. Doshin peut aussi se transformer à volonté en géant maléfique pour tout saccager et faire peur aux individus. Dans ces cas-là, il récolte de la haine ce qui ne l'empêche pas pour autant de grandir. A la fin de la journée, notre géant s'en va pour revenir le lendemain et recommencer sa dure journée d'esclave au service de la populace.
De temps en temps, Doshin doit protéger les habitants d'une catastrophe naturelle comme d'une tornade ou d'une irruption volcanique. Mis à part ces évènements très aléatoires, rien ne vient perturber le quotidien qui consiste donc toujours à prendre soin des villageois. Le concept n'est donc pas vraiment engageant mais jusque-là, je peux quand même concevoir que certains joueurs y trouvent du plaisir. Hélas pour eux, Doshin ne s'arrête pas en si bon chemin car tant qu'à faire un jeu au concept minimaliste autant aller jusqu'au bout de ses envies et faire un jeu à la réalisation simplette qui friserait même le foutage de gueule sur une console telle que la GameCube.
C'est donc ce qu'ont fait les équipes de Nintendo. Le design général du jeu n'est certainement pas du goût de tout le monde. S'il prête à sourire au début, on se lasse vite de cette « grande banane à patte » (copyright Dinowan) et de sa démarche de gros lourdaud. Le géant se déplace à la même vitesse qu'une tortue sous somnifère et met un quart de siècle à parcourir les distances qui séparent les villages de l'île. Ce problème est en partie résolu lorsque Doshin grandit, mais comme cette truffe repend sa taille initiale chaque matin, on passe le plus clair de son temps à se traîner péniblement d'un point à l'autre. La petite île de Barudo, unique décor du jeu, est moche, les déformations du paysage pas spectaculaires et le ciel tout vilain. En plus, le jeu est truffé de bugs de collisions. Le géant traverse certaines parties du décor. Et que dire des superbes animations bi-étapes qui parsèment le tout ? La bande-son est du même acabit et propose des cris d'oiseaux et des petites musiques bien débiles. Saluons tout de même le doublage en français même s'il reste très discret et pas toujours d'une qualité irréprochable.
On est donc perplexe devant ce Doshin. On a beau retourner le problème dans tous les sens, il reste toujours une question qui reste sans réponse : à qui s'adresse ce jeu ? Parce qu'entre son gameplay ultra-répétitif et guère passionnant et sa réalisation à 2 centimes d'Euros, on ne sait pas très bien qui pourra s'intéresser à ce géant.
- Graphismes7/20
Si on ne peut pas vraiment se prononcer sur le design général du jeu (ça plaît ou ça plaît pas), on peut quand même remarquer les nombreux bugs d'affichage que chaque collision occasionne. Simplement inadmissible sur un jeu où il n'y avait pratiquement que ça à gérer. Les déformations sont plus soignées mais pas spectaculaires pour un sou.
- Jouabilité7/20
Le géant se déplace à pas de fourmi sur son île. Il peine à tourner et sa zone d'action est assez imprécise. Il arrive par exemple qu'à la place de prendre l'arbre, on ramasse le villageois qui passait par là.
- Durée de vie8/20
Dans l'absolu, le jeu n'a pas de fin, mais à cause de tous ses défauts, on n'a pas envie de s'attarder dessus. Il y a tellement mieux à faire sur la même console.
- Bande son6/20
Un effort a été fait pour inclure une voix française, mais les bruitages et les musiques sont tellement nuls qu'on préfère encore jouer sans le son.
- Scénario10/20
Une légende bien simpliste prétexte à un jeu qui l'est tout autant. Aucune évolution ne vient perturber le quotidien paisible du géant. Bref, on s'ennuie ferme.
Avec Doshin The Giant, Nintendo nous prouve bien malgré lui que même les plus grands peuvent avoir des ratés. Passée la phase de curiosité, on se lasse très vite de la tronche du géant. Et vu que les journées se répètent les unes à la suite des autres sans apporter de quelconques renouvellements au gameplay, on préfère éteindre la console pour aller faire autre chose comme par exemple aller manger. C'est qu'il m'a donné faim le géant avec son allure de grande frite et son nom de hamburger !